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RAPPORT MORAL 2023

Un balancement entre inquiétudes grandissantes et satisfactions sur la conduite des actions

L'assemblée générale s'est déroulée en présence de M. Philippe Merlin, ambassadeur et conseiller diplomatique auprès de la préfète de la région Centre - Val de Loire.

Dans la foulée de l’exposition à la médiathèque qui s’est close en milieu de semaine, je vous présente ce rapport moral concernant 2022. En reprenant mes précédentes interventions, en mêmes circonstances, il ressort que les propos ont en constance, un balancement entre inquiétudes grandissantes du fait de l’avancée du djihadisme et satisfactions de la conduite à bonne fin des actions de coopération par nos partenaires.

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Cette année, mon propos alternera coups de griffes et coups de chapeau.

Coups de griffes :

  • au Consulat de France à Ouaga qui a réussi l’exploit de délivrer le visa aux membres de la délégation de Bittou, 18 heures après le départ de leur avion, ce qui les a obligé à repayer un vol aller ;

  • aux politiques burkinabé et aux coups d’Etat successifs en janvier puis en septembre ;

  • aux gouvernements militaires successifs, qui ont désorganisé les collectivités locales, pourtant échelle de citoyenneté et de développement, par la dissolution des conseils municipaux et, pour Bittou, le changement concomitant du préfet et du secrétaire général de la mairie, sans que ce dernier ait été remplacé jusqu’à ces derniers jours (un nouveau SG est arrivé mi-janvier) ;

  • au MEAE et ses critères d’attribution de subventions qui ne prévoient que le soutien à des « prestations intellectuelles » et, ce faisant, a attribué
    25 000 € à Châteauroux pour des dépenses subventionnables de 8 200 €. Comprenne qui pourra.

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Et, au-delà des coups de griffes, abominations pour les terroristes qui ont semé la mort par 3 fois en décembre à Bittou :

  • des amis qui avaient regardé un match de foot à la télévision, avec la conséquence immédiate de la fermeture du lycée départemental puisque le proviseur et 3 professeurs ont perdu la vie dans cet attentat ;

  • un vieux père de famille était allé ramasser des plantes en brousse pour soigner son enfant malade, son fils ne sera pas soigné et le père ne reviendra pas vivant de la brousse ;

  • des voyageurs sur l’axe Ouaga-Lomé dépouillés de leur bien et 7 d’entre eux tués sur place, dont 3 proches de l’Imam de Bittou, homme de tolérance et de paix, ainsi qu’un important commerçant dont la générosité en direction des plus démunis de la commune était très connue.

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Comme me l’on dit et répété plusieurs de nos interlocuteurs à Bittou, « ici, c’est la psychose », « la ville est morte ».

Que notre réunion soit dédiée à la mémoire de ces victimes de l’obscurantisme et de la barbarie !

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Coups de chapeau :

  • au comité de Bittou, avec ses bénévoles, qui porte seul les projets de partenariat et donc les projets de développement en direction des populations les plus en difficultés. Ils ont su, en concertation avec nous et avec le préfet local, ajuster les lieux d’implantation des forages, en conciliant priorité des besoins des populations mobiles sous la pression des terroristes et sécurité des bénévoles et de l’entreprise chargée des travaux ;

  • à la délégation de Bittou venue en juin-juillet 2022 pour le séminaire G5 Sahel à Orléans et le travail qui a été conduit ici ;

  • aux membres du comité de Châteauroux qui restent mobilisés malgré les désordres sécuritaires et politiques au Burkina ;

  • à l’agence de l’eau Loire Bretagne qui a su adapter ses règles pour soutenir le programme 2022-2024 de forages en intégrant ceux à double vocation d’alimentation en eau potable des populations et activités économiques pour les maraîchers et les éleveurs.

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Un autre motif de satisfaction, le soutien de l’ambassadeur Merlin, conseiller diplomatique auprès de la préfète de région, qui ne ménage pas ses efforts dans sa fonction d’interface avec MEAE.

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Ce balancement, entre désolation et satisfactions, nous interroge sur le devenir de nos relations avec Bittou. Les relations diplomatiques entre la France et le Burkina sont très difficiles à suivre : outrances de la rue à Ouagadougou, tâtonnements du gouvernement burkinabé, influences de la Russie, ambivalences de la diplomatie française, activismes sur les réseaux sociaux des uns et des autres, propagandes tous azimuts,… Où est la prise en compte la vie des burkinabé, des paysans, des enseignants de Bittou, des enfants ? que vont devenir les adolescents privés de lycée à Bittou, et ailleurs ? sans formation, deviendront-ils des recrues faciles pour les djihadistes ?

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Comment ignorer le début de cette année avec des annonces de demandes de renvoi de l’ambassadeur de France à Ouaga, la demande de départ des militaires français basés à Ouaga ?

 

Tout ceci doit nous engager à la réflexion, avec lucidité, sans découragement et sans faiblesse à l’égard de la violence et de la montée de l’obscurantisme. Notre mobilisation n’est dirigée que vers les populations mais comment continuer lorsque leurs vies sont en danger et lorsque les autorités du pays rejettent cette solidarité et où des groupes pour qui la vie humaine n’a aucune valeur prennent le pouvoir ?

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Châteauroux, le 3 février 2023

 

Le président,

Alain Dubost

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